Introduction au séminaire de recherche du 8 décembre 2007

Introduction au séminaire de recherche AFRESC : Rencontre du samedi 8 décembre 2007 au GRAPE – de 9h30 à 13h00.

1ère journée :

En préparation de cette rencontre nous avons diffusé le texte d’introduction de Enriquez « Clinique du Pouvoir ».

Pour le travail de cette session, plutôt que nous définissions seul l’objet de travail, nous avons pensé plus intéressant d’en faire une des premières modalités de notre recherche sur l’institution et la liberté de penser, notre thème/problématique.

Objectif : définir notre objet de recherche

Pourquoi définir cet objet ensemble ?

Parce que définir l’objet de la recherche c’est circonscrire une question qui fait problème – plus précisément, comme le souligne Isabelle Stengers, philosophe des sciences, la question c’est le problème lui-même !

Procéder ainsi, c’est déjà entrer en recherche ; faire œuvre d’« intelligence collective ». Trouver cette question commune c’est déjà nous mettre au travail …car les questions dans la recherche importent plus que les réponses (en d’autres termes, la question posée contient sa propre réponse).

Car formuler une question, c’est déjà définir le périmètre d’un problème ; et donc, poser les termes de la question c’est bel et bien induire les attendus d’une réponse. Poser un problème (on dirait un diagnostic pour le médecin), c’est orienter une réponse : poser les termes de la question, c’est prendre le pouvoir sur celui à qui on la pose, c’est-à-dire encadrer et définir le champ des réponses possibles. En science de la nature, pour vérifier une hypothèse on construit un dispositif technique dont on « attend » des réponses. C’est ce que Stengers préfère nommer un « propositif »[1]. C’est ce que nous tenterons de faire à notre manière et dans notre champ.

Ainsi, par exemple à la question faut-il autoriser les OGM, la réponse (quelle qu’elle soit) conditionne une reconnaissance préalable de l’objet lui-même ; à savoir la reconnaissance de fait d’une action de modification de la nature et de sa brevetabilité : la question initiale doit donc plutôt être la suivante : peut-on breveter le vivant et considérer qu’une modification du génome est une création intellectuelle comme une œuvre ou une machine ?

En ce sens la question n’est pas tant celle de l’autorisation ou non (qui relève d’une décision politique, même scientifiquement argumentée) mais de la nature de la question posée.

Le propositif ici (et non « dispositif »), c’est la démarche des conférences citoyennes (citoyens, scientifiques, élus, etc.) : non pas répondre à une question préparée mais définir ensemble la question, qui devient : Pourquoi les OGM ?

La réponse : pour répondre à des enjeux économiques, scientifiques et politiques qui sont l’avenir techno-scientifique de demain. Mais quelles sont les incidences des OGM ? La réponse est : on ne sait pas. Nous ne sommes sûrs de rien. La préconisation devient : précaution. La décision : encadrement et surveillance.

Poser les termes de notre question de recherche sera donc l’enjeu de cette rencontre.

Didier FAVRE

Novembre 2007

AFRESC



[1] Bensaude-Vincent, Stengers :100 mots pour commencer à penser les Sciences ; Les empêcheurs de penser en rond  ; Paris, 2003.

Rappel :

Notre problématique de recherche.

La liberté de penser est-elle soluble dans l’institution ? Dans le secteur social, médico-social et en général dans la plupart des institutions, la tendance générale semble être la suivante : l’organisation se resserre en interne sur ses acteurs et son propre fonctionnement (hiérarchie, règles, procédures formelles, organisation, organigramme, bilan d’activité, rationalisation budgétaire, compressions de personnel, productivité,…) plutôt que sur la finalité, le projet ou le service à rendre – étant ce qui donne pourtant sens à leur activité (la finalité est le sens de l’organisation, ou « finalité externe » pour l’Afresc).

Comme si la cohérence interne de l’institution devait toujours finir par primer sur le service à rendre…

Du côté des professionnels, prendre au mot l’institution dans ce qu’elle affirme vouloir « pour le bien des gens » au regard de ses valeurs fondatrices (éthique) est donc pour un professionnel bien intentionné et bien disposé le meilleur moyen de se mettre en difficulté face à sa hiérarchie ou sa tutelle !

Comme si pour l’institution il vaut mieux un agent en tension avec « l’usager » qu’un agent en tension avec le système qui le légitime. Le déficit démocratique des institutions et des services est en grande partie responsable du prix payé par la population ou par les bénéficiaires pour accéder aux prestations de l’organisation.

De fait les professionnels, tant du fait de leur formation que de leur expérience, tendent donc très rapidement à se conformer aux logiques internes, à rechercher la cohésion groupale et identitaire (internalisation des règles, accent sur les relations personnelles, adhésion au groupe, conformation méritocratique au regard de critères « internes » à l’organisation du service qu’à sa finalité) plutôt que de faire valoir leur autonomie de pensée et leur liberté d’action afin d’atteindre les objectifs pour lesquels l’organisation s’est engagée – et ceux auxquels eux-mêmes croient de bonne foi.

La question posée devient la suivante : penser dans l’institution, est-ce prendre le risque de marquer une différence et obliger les autres à prendre position ?

Est ce l’institution qui doit « penser en nous » ou bien à nous « de penser l’institution » ou encore de « faire penser l’institution » (ce qu’elle ne peut faire « seule », en fait, puisqu’elle n’est qu’une projection / extension de nous-mêmes) ?

N’avons-nous pas enfin, l’organisation que nous méritons ?

Comment introduire de la pensée dans l’institution sans être acculé à la dissidence ?

 

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2007
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